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Petites chroniques hors temps
Petites chroniques hors temps
  • Ecrire. Une pause pour soi-même, un chemin à souvenirs, une machine à prise de recul mais aussi...un plaisir grammatical. Des années que j'écris et ça ne s'arrête pas. Seul le temps s'arrête quand on écrit...Alors à chaque pause sa chronique.
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Petites chroniques hors temps
18 avril 2015

Angoisses, folies et cie.

 

« Mais sait-on quels sont les sages et quels sont les fous,

dans cette vie où la raison devrait souvent s'appeler sottise

et la folie s'appeler génie ? »

Maupassant.

 

                                    duanemichals

 

Le monde de la psychiatrie. Ceux qui y travaillent en pensant donner des leçons aux autres sur ce qui est normal sont à des millions de kilomètres de la réalité. Ce sont les "patients", ces personnes blessées par la vie et leur esprit lui-même, ce sont eux qui nous apprennent et qui nous font évoluer. Leur tête est trop petite pour contenir toutes ces pensées qui les rongent, et, trop occupés à tenter d'y mettre de l'ordre ou à les faire sortir, leur corps est oublié. Et leur corps en devient lui-même le contenant. Réceptacle de toutes leurs douleurs, un jour il déborde. Avec toutes les questions qu'ils se posent et donc qu'ils me posent, tout ce qu'ils se renvoient à eux-mêmes se reflètent sur les autres. C'est ce qui m'arrive presque tous les jours, quand une personne vient déposer dans ma salle des questions, des angoisses, des douleurs, des blocages, des larmes et des rires. Leurs questions me concernent aussi, leurs problèmes font écho aux miens, aussi. C'est inévitable. Par milliers, leurs questionnements fusent. 

"Mais ça veut dire quoi exactement, se donner les moyens ? "
"Donc si j'arrive pas bien à organiser mes idées, ça veut pas dire que je suis bête ?"
"Vous croyez en l'immortalité vous ?".
"Je suis vraiment fou ?". 
"Et vous pourriez me faire travailler sur l'image de mon corps ? Je n'aime pas mon corps." 
"Comment fait-on pour apprendre la patience ?"
"Je n'arrive pas à lâcher prise sur les choses, je veux tout contrôler.
Comment fait-on pour lâcher prise ?"
"La présence des gens me rend mal." 
"J'ai peur de mourir, parce que ça veut dire que je n'existerai plus."

Comment toutes ces questions ne peuvent-elles pas résonner en chacun de nous ? Nous les avons tous en nous. En cherchant à comprendre ce qui les taraudent, en étudiant les mécanismes de défense qu'ils utilisent pour se protéger des attaques, c'est notre propre fonctionnement qui se questionne aussi.   

" Mais c'est quoi l'angoisse ? "

Voilà bien une question que nous devrions tous nous poser. Nous le vivons tous. Ce sentiment envahissant, où tout notre être se met en alerte vis-à-vis d'une menace extérieure que nous peinons à identifier. L'angoisse, c'est comme la peur, mais sans son élément déclencheur. Nous redoutons quelque chose sans savoir quoi exactement. Alors on sursaute au moindre bruit, on observe tous les détails, et notre corps le vit. L'oppression sur le thorax, la boule au ventre, la respiration entrecoupée, les sueurs froides. C'est cette angoisse de fond qui nous habite et nous rend vigilant à tout. Angoisse de vie ou angoisse de mort ? L'angoisse et son pouvoir absolu, qui nous rend incapable de nous concentrer sur le moment présent. Angoisse d'exister, qui pousse certains à se ronger les ongles ou s'entortiller les cheveux. Dans les milieux où je travaille, j'entrevois les sommets de l'angoisse. Je vois des personnes se balancer d'avant en arrière, arracher la moitié de leurs poils de barbe, alors que d'autres en sont tellement submergés qu'ils se mordent la main jusqu'au sang. L'angoisse me questionne, elle est insidieuse et dévore tout sur son passage. Comment l'apaiser ? Cette angoisse qui nous habite tous délivre pourtant des messages importants. Elle nous assure peut-être que nous sommes là. En s'infiltrant dans le corps, comme si ce dernier voulait se rassurer : oui, je suis bien là sur cette terre, j'existe, j'existe, j'existe.

 

                                        dos courbe (mine graphite) 40x30cm

 

 

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