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Petites chroniques hors temps

Petites chroniques hors temps
  • Ecrire. Une pause pour soi-même, un chemin à souvenirs, une machine à prise de recul mais aussi...un plaisir grammatical. Des années que j'écris et ça ne s'arrête pas. Seul le temps s'arrête quand on écrit...Alors à chaque pause sa chronique.
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Petites chroniques hors temps
3 juillet 2016

Interlude du être

Si l’on devait me demander que serait le bonheur à mes yeux, je ne dis pas que je répondrai très clairement. Je crois par contre qu’il y a une chose que je tiendrais à dire à propos du bonheur. Je ne vais pas évoquer le bonheur comme un enchaînement de moments de joie, mais plutôt celui qui se fait sentir en arrière fond de nous-mêmes, celui qui semble comme un fluide coulant constamment dans le corps. Prendre des moments avec soi-même. Voilà entre autres, ce que je ressens comme moment de joie, et à la fois comme nécessité pour se construire en tant qu’être vivant heureux. Etre centré, se retrouver seul avec soi-même et pouvoir apprécier la bienfaisance de ces moments-là. Quand je prends du temps avec moi-même, je suis le rythme qui m’est propre, je l’écoute. Je ressens comme un vent de liberté, comme une tranquillité ancrée dans mes entrailles. Je décide de faire ou de ne pas faire, mais ce qui m’apaise, c’est ce silence. C’est un silence intérieur, mon mental tourne à vitesse normale voire modérée, et c’est agréablement apaisant. Les vacances de l’esprit laissent alors place aux voix de l’écoute. Je peux prendre du temps pour observer, pour penser calmement, pour me vider la tête ou bien la remplir de choses nourrissantes. Je prends plaisir à cuisiner quelque chose de sain pour mon corps, plaisir à le manger sur ma terrasse en écoutant les oiseaux chanter. Je plie mon linge avec toute la patience dont je fais si rarement preuve, en écoutant avec intérêt une émission de radio. Je fais mes exercices de yoga, je ferme les yeux et respire, dans le silence du murmure des lieux. Je sens mon corps et je le remercie, même si par endroit je le sens tendu, oppressé, ou raide. Etonnement et très souvent dans ces moments-là des choses inattendues et belles se produisent. Je crois qu’être heureux ne tient pas à de grandes choses inatteignables. Pour le trouver il faut peut-être cesser de regarder toujours ailleurs, de toujours l’attendre en haut du sommet. Il se trouve à l’intérieur de nous-mêmes, et on peut aussi le trouver lorsque l’on plonge dans nos propres tréfonds. J’eus un jour l’impression d’avoir compris quelque chose, lorsque je réalisais que je pouvais me supporter toute seule et ne pas me haïr. S’écouter, atteindre ses propres objectifs en complète intégrité avec ce que l’on est, laisser faire les choses et aller un peu les chercher tout seul, ne pas se perdre totalement dans les autres et accepter le vide quand il y en a. Etre seul et rester calme n’est pas si simple, beaucoup de personnes n’y parviennent pas alors que d’autres y parviennent trop. Dans tous les cas, lorsque l’on prend quelques instants pour entrer en nous-mêmes, on peut se poser la question : suis-je bien tout seul ? Est-ce que je me supporte ? Suis-je capable d’être sans devoir me greffer sur les autres, sur le faire, sur les biens que je possède ou dois posséder ? La réponse est bien souvent facile à trouver. 

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17 janvier 2016

La fin et le renouveau

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On explique pas trop les envies de changement.
Et nombre de courants scientifiques et spirituels postulent que la vie est une succession de cycles.

Peut être ai-je bouclé un cycle, un autre vient donc prendre la suite. 

Voici donc la fin de ce blog. Les textes qui y habitent depuis des années y resteront bien sûr.

La suite s'enchaine, et un nouveau cycle commence.

Continuons à écrire et partager par ici :

 

Chroniques douces d'un temps

 

Bonnes lectures...

 

29 octobre 2015

Retranchée.

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Cela se fait à retardement, mais oui, le retour est difficile. Je ressens comme un vide, un vide qui envahit mon corps alors que mes pensées tournent, tournent et se retournent dans ma tête comme des habits dans un sèche linge. Ce n'est pas que je suis malheureuse. Ce n'est pas que je suis perdue. C'est comme un mélange de questionnements, un soupçon de doute, avec de l'attente, du vide, un peu de nostalgie et un brin de tristesse. Et puis associé à ça, je suis tendue. Il y a au dessus de moi comme quelque chose qui me tient. Qui me tient en vigilance, en éveil. Je sens que je serre souvent les dents, j'ai une tension quelque part et je ne parviens pas à lui donner explication. Quand quelque chose me tire de mon sommeil le matin, ne serai-ce que très légèrement, cela suffit à éveiller dans ma conscience le train de mes pensées, qui, dès l'instant du réveil, met les bouchées doubles pour avancer. Mais avancer vers quoi ? D'habitude je me rendors comme une masse. Là, non. Je referme les yeux, je tourne et je retourne mon corps sous la couette, et le sommeil ne revient plus car mes pensées ne lui laissent pas la place. Alors comme ça, je sais. Je sais que je ne suis pas dans une période des plus tranquilles en ce moment. Après trois semaines passées en Colombie, déconnectée de tout, puis une semaine en famille, je me vois reprendre les rennes de mon quotidien. C'est peut-être ça. Passé un mois, à se laisser guider, à se laisser porter, à ne penser à rien ou qu'à l'instant présent...Passé un mois à penser à ce que l'on devra faire pour les autres, dépenser une énergie monstre dans des futilités...Difficile de reprendre fermement en main les commandes. Et seule, en plus. Je ressens un fort et précieux besoin de retrouver un rythme, de penser à moi, de me relancer, de retrouver mon monde. J'ai soif de culture, de rires, de partages, mais aussi d'un peu d'isolement. C'était ça, avant de partir. J'étais lancée sur mes rails. Je fonçais. C'est parfois difficile de reprendre de la vitesse après s'être complètement immobilisé.

Dans tous les cas, c'est un étrange mélange de sentiments qui m'habite ces temps-ci. Essayer de l'identifier, le décrire n'est pas chose facile. Je ne sais pas dire si ce mélange de sentiments est positif ou négatif. En posant du positif ou du négtif, on y met un jugement. Faut-il forcément juger ce que l'on ressent ? Je sens au fond de moi que ces sentiments sont là parce qu'ils sont nécessaires. Nécessaire pour quoi, je n'en sais rien, mais j'ai décidé d'écouter ça, de ne pas lutter contre. Je suis, comme on dit, dans le bas de la vague. Il y a des périodes, comme ça, on se met plus en veilleuse. Puis pendant d'autres périodes, on est explosif, éclatant. C'est simplement ça alors.

Je suis en veilleuse. Et c'est un des meilleurs moments pour écrire.

13 juin 2015

Etes-vous là ?

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Avez-vous déjà remarqué le sentiment qui s'étend en vous quand vous êtes réellement présent à ce que vous faites ? Nous sommes parfois tellement autocentrés, par des choses même inconscientes, que nous sommes capables de passer devant un trésor sans le voir. Ainsi, on rêvassera au feu rouge, on n'aura que peu envie de regarder les photos de voyage ou le récit de celui qui en reviendra, parce que cela prend du temps, et nous on y était pas. On pensera à ce papier à remplir et envoyer avant demain matin, tout en cassant des œufs pour faire un moelleux au chocolat. On étendra le linge dehors en remarquant qu'il reste une tâche sur le drap, puis on relancera une autre machine en pensant qu'après il ne faudra pas oublier d'aller acheter une salade. On pensera sans cesse à ce que l'on pourrait bien faire de son avenir, ou on fera tourner en boucle des souvenirs du passé. On n'écoutera l'autre parler que d'une oreille, parce que dans notre tête il y a trop de choses à penser. 
Ne pas être disponible, c'est ne pas être présent. Présent à soi-même, à l'autre, et à tout ce qui se passe autour. Pourtant, quand on est suffisament là pour saisir ce présent...et bien tout devient différent. On a ce sentiment très puissant qui remonte du ventre jusque partout : on est bien. Rien ne compte d'autre autour. Non seulement on met tout le reste dans un coin de notre tête, ce qui est apaisant, et en plus on découvre, ce qui est enrichissant. Écouter un ami parler, prendre le temps, mais l'écouter réellement : saisir chacun de ses mots, mieux compatir, comprendre, et ainsi, lui se sent pris en compte, car ce que nous lui répondons en est adapté, vrai, juste, sincère. Ecoutons-nous vraiment les autres ? C'est un bonheur, et c'est très riche. On n'est pas à côté de la plaque. On est là. Et on vit pleinement tout ce qui est là. J'aime beaucoup que quelqu'un me parle d'un pays où il a voyagé ; en l'écoutant vraiment, c'est comme si j'y étais à ses côtés. Mais le fait d'être présent, c'est aussi des milliers de petits détails, qui parviennent à transformer le quotidien et notre manière d'être à l'intérieur. Faire la cuisine, en constatant combien les épices embaument l'air autour, combien la texture de la crème est onctueuse, combien les mélanges de couleur sont vifs, et les saveurs se dispersent subtilement dans la bouche. Être au volant de sa voiture, et porter son attention sur les paysages environnants. Prendre un café sur sa terrasse, en ressentant les rayons du soleil sur la peau ; c'est comme s'ils entraient à l'intérieur pour donner leur énergie. 

Quand j'y réfléchis, je me dis qu'être heureux, c'est aussi ça. C'est être présent. Se raccrocher aux choses du présent n'amène ni remords (comme le passé pourrait le faire), ni angoisses (comme le futur en est l'expert). Je me souviens aussi, que dans les périodes où j'allais mal, c'est au présent que je me raccrochais, à toutes les choses qui m'entouraient. Cela demande beaucoup de force, mais le jeu en vaut la chandelle. Ma douleur me fichait la paix, car en étant présente à ce qui m'entourait, je me sentais être moi. 

C'est un sentiment irremplaçable que de constater et saisir le moment présent. C'est comme arrêter d'osciller et se stabiliser, c'est comme se laisser tomber sur un lit moelleux. 

Il est 9h38 du matin, étrange, pour une fois j'écris le matin. Semi-assise sur mon lit, dans la pénombre, écoutant une musique, je savoure la douceur du moment. Je suis seule, et ce calme fait un bien fou. Je terminerai cette chronique par une citation, que j'ai notée hier sur mon carnet, quand j'étais en formation. Étrangement, elle illustre parfaitement ce texte, alors pourquoi ne pas en profiter ?

" Le passé est une histoire, le futur est un mystère, car incertain, mais le présent, lui, est un don, un cadeau...

C'est d'ailleurs pour cela qu'il s'appelle présent."

31 mai 2015

Trois bouts qui se partagent

Ce samedi-là, nous étions trois femmes. Nous étions parties, curiosité en poche, dans un salon bien-être. Nous ne pensions pas que le temps passerait si vite, nous ne pensions pas y expérimenter des choses, nous ne pensions pas en ressortir mieux. L'une avait versé un torrent de larmes le matin même, sentant la fatigue mélancolique d'un cycle, alors que l'autre versait des larmes depuis un mois, sentant, elle, les pics d'un passé dur à porter au plus profond. La dernière, elle, ne sentait rien de particulier, si ce n'était les coquilles de sa carapace lui effleurer la peau. La journée défila vite, d'heures en heures, occupées à partager des rires, des anecdotes, des confidences et des ressentis. Et puis vint doucement le soir, où chacune, rechargée à sa manière, appréciait ce que les autres lui apportaient. La soirée, imprévue de toutes, se décida vite. La terrasse d'un petit restaurant, quelques cigarettes, un verre de blanc, un verre de rouge et un verre d'eau. Trois boissons, trois femmes. Chacune avec ses problèmes et sa valise de casseroles que le passé leur avait laissé en souvenir. L'une portait en elle les traces d'un enfant perdu à regrets, l'autre portait cette perte par volonté, alors que la dernière n'en avait pas le poids. Elles portaient en leur chemin commun des histoires d'exils, de respirations. Elles respiraient le même air du départ et de l'arrivée. Les larmes de certaines perdaient leurs traces, alors que la coquille de l'autre se fissurait. Elles savouraient leurs intimités, écoutant avec leurs cœurs les blessures des autres et les leurs, les partageaient, les pansaient, et contemplaient leurs cicatrices avec douceur, distance et beauté. Il se créait autour d'elles un cocon d'empathie et d'apaisement, mêlé d'un soupçon de rires. Elles parvenaient à y déposer leurs bagages, dans la confiance des autres. Le temps semblait s'être arrêté, et il ne suffisait rien de plus à personne, même pas de pulls. Plus de temps, plus de fraîcheur, des moments figés dans le reste du monde qui continuait à tourner autour. Il ne suffisait rien à personne car ce moment simple leur suffisait à elles-mêmes. Chacune restait elle-même dans une bulle commune. C'était imprévu, simplement bon, c'était une pause.

Nous étions parties initialement, curiosité en poche, dans un salon bien-être. Quoiqu'en fut le déclencheur, le bien-être dura bien au-delà du salon. Quand la soirée se termina, chacune prit le chemin de sa maison, avec gratitude, sourire et apaisement. Parmi les trois, une fois rentrée chez elle, l'une d'entre elles décida de graver ce moment dans les mots. Pour immortaliser cette journée dont le temps s'était arrêté. Pour souligner les beaux moments, comme ça, imprévus et si magiques. Pour dire merci à cela. Pour en être reconnaissante, tout simplement.

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21 avril 2015

Pourquoi pas à toi ?

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Si l'envie me vient d'écrire sur toi ce soir, je ne l'explique pas. Au jour le jour, il se passe des centaines de choses dans la vie des gens et aussi dans la mienne. Des centaines de pensées traversent ma tête chaque jour qui passe, et va savoir pourquoi, aujourd'hui 
c'est toi qui trotte dans ma tête, aujourd'hui plus que les autres jours. Peut-être es-tu là, près de moi ? Est-ce ta présence ?
Je me dis que si l'envie me vient de te dédier un paragraphe, c'est que je dois le faire. Je n'écris que rarement pour des personnes, enfin, je veux dire par là que dans mes textes, je philosophe plus que je n'adresse.

Mais ce soir je m'adresse à toi, ce qui est rare. Je me suis adressée à toi pendant plus d'un an, beaucoup, mais aussi quand tu es partie de ce monde, beaucoup encore. Et puis j'ai accepté. Accepté ton besoin de partir sans que personne ne puisse rien y faire, accepté que je ne te reverrai plus, que je ne t'apporterai plus rien. J'ai appris à mettre de côté mon besoin de reconnaissance, en admettant bien qu'il y a des millions de choses dans la vie qu'on ne maîtrise pas. J'ai fais mon deuil de professionnelle, mais ce soir, si j'en viens à t'écrire, c'est que je n'ai peut-être pas terminé mon deuil d'être humain. Tu n'as pas été la seule à partir, tu sais. D'autres t'ont suivie. Mais c'est vers toi que mes pensées se tournent. 


Ton départ. Je le sentais bien au fond de moi, je le voyais au fond de ton regard perçant, je le voyais à ton corps qui disait "je ne peux plus" en s'engourdissant, à tes gestes qui allaient de moins en moins loin, je le sentais même au rythme de ta respiration. De petites pauses en petites pauses, un jour elle s'est arrêtée. Tu m'as fais peur tu sais. Je n'aurais pas supporté que tu t'en ailles devant moi. Mais tu as bien choisi le moment de ton départ, et cela me soulage de penser que tu es partie sereine, en présence de ceux qui t'ont fait entrer dans ce monde. C'était un beau message de ta part, adressé à eux, et réconfortant pour moi aussi. 
Je n'ai partagé qu'un bout de mon chemin avec toi, mais je t'ai accompagnée sur la fin du tien. Et je me suis rendue compte qu'arrivée au bout de ton chemin, lorsque tu n'étais plus là, je ne connaissais que peu de choses de ton passage ici. Je ne connaissais pas les gens qui t'aimaient, je ne connaissais pas tous les endroits où tu étais allée avec eux, ni pourquoi tu y étais allée. Je ne t'ai jamais connue petite, je n'ai jamais entendu un mot sortir de ta bouche, je n'ai jamais vu tes bras s'étendre au maximum (car je sais qu'un jour tu avais pu le faire), je ne t'ai jamais vue manger, je ne t'ai jamais vraiment vue bouger. Mais pendant plus d'un an, j'ai partagé ta vie. Pendant plus d'un an, je t'ai dis bonjour, merci, au revoir, bonnes vacances. Pendant plus d'un an, je t'ai parlée sans attendre de mots en guise de réponse. J'ai partagé avec toi des regards qui parlaient d'eux-mêmes, en eux j'y ai compris tes joies, tes craintes, tes douleurs, tes incompréhensions, tes envies de rire et de pleurer. Ensemble, on a découvert, sourit. Tout le monde te disait combien ton regard était beau, présent, expressif, profond. Comme si tu arrivais, en lui seul, à faire passer tout ce qu'un corps ne peut communiquer. Ton corps devait être un fardeau. En lui j'ai senti tes tensions, tes limites. J'ai fais ce que j'ai pu pour t'en soulager. Je sais qu'aujourd'hui tu en es libérée, et j'en suis contente pour toi. 

D'où venait cette force et cette douceur au fond de toi ? Tu les transmettais par ton simple regard. Tu transmettais l'amour, tu transmettais la lumière, tu transmettais un élan de vie que peu de personnes possèdent. Toi qui avais toutes les raisons de te plaindre, tu donnais aux autres une joie et une chaleur invisible mais palpable. On aimait être en ta compagnie, on était simplement bien et tranquille en ta présence. On avait pas besoin de mots. 

Voilà, parmi les centaines de pensées qui me sont passées par la tête aujourd'hui, toi tu y es restée un peu plus que toutes. Pourquoi, il y a des choses qu'on n'explique pas et ne maîtrise pas. Mais le fait est qu'ici, quelques phrases te sont dédiées. 

 

18 avril 2015

Angoisses, folies et cie.

 

« Mais sait-on quels sont les sages et quels sont les fous,

dans cette vie où la raison devrait souvent s'appeler sottise

et la folie s'appeler génie ? »

Maupassant.

 

                                    duanemichals

 

Le monde de la psychiatrie. Ceux qui y travaillent en pensant donner des leçons aux autres sur ce qui est normal sont à des millions de kilomètres de la réalité. Ce sont les "patients", ces personnes blessées par la vie et leur esprit lui-même, ce sont eux qui nous apprennent et qui nous font évoluer. Leur tête est trop petite pour contenir toutes ces pensées qui les rongent, et, trop occupés à tenter d'y mettre de l'ordre ou à les faire sortir, leur corps est oublié. Et leur corps en devient lui-même le contenant. Réceptacle de toutes leurs douleurs, un jour il déborde. Avec toutes les questions qu'ils se posent et donc qu'ils me posent, tout ce qu'ils se renvoient à eux-mêmes se reflètent sur les autres. C'est ce qui m'arrive presque tous les jours, quand une personne vient déposer dans ma salle des questions, des angoisses, des douleurs, des blocages, des larmes et des rires. Leurs questions me concernent aussi, leurs problèmes font écho aux miens, aussi. C'est inévitable. Par milliers, leurs questionnements fusent. 

"Mais ça veut dire quoi exactement, se donner les moyens ? "
"Donc si j'arrive pas bien à organiser mes idées, ça veut pas dire que je suis bête ?"
"Vous croyez en l'immortalité vous ?".
"Je suis vraiment fou ?". 
"Et vous pourriez me faire travailler sur l'image de mon corps ? Je n'aime pas mon corps." 
"Comment fait-on pour apprendre la patience ?"
"Je n'arrive pas à lâcher prise sur les choses, je veux tout contrôler.
Comment fait-on pour lâcher prise ?"
"La présence des gens me rend mal." 
"J'ai peur de mourir, parce que ça veut dire que je n'existerai plus."

Comment toutes ces questions ne peuvent-elles pas résonner en chacun de nous ? Nous les avons tous en nous. En cherchant à comprendre ce qui les taraudent, en étudiant les mécanismes de défense qu'ils utilisent pour se protéger des attaques, c'est notre propre fonctionnement qui se questionne aussi.   

" Mais c'est quoi l'angoisse ? "

Voilà bien une question que nous devrions tous nous poser. Nous le vivons tous. Ce sentiment envahissant, où tout notre être se met en alerte vis-à-vis d'une menace extérieure que nous peinons à identifier. L'angoisse, c'est comme la peur, mais sans son élément déclencheur. Nous redoutons quelque chose sans savoir quoi exactement. Alors on sursaute au moindre bruit, on observe tous les détails, et notre corps le vit. L'oppression sur le thorax, la boule au ventre, la respiration entrecoupée, les sueurs froides. C'est cette angoisse de fond qui nous habite et nous rend vigilant à tout. Angoisse de vie ou angoisse de mort ? L'angoisse et son pouvoir absolu, qui nous rend incapable de nous concentrer sur le moment présent. Angoisse d'exister, qui pousse certains à se ronger les ongles ou s'entortiller les cheveux. Dans les milieux où je travaille, j'entrevois les sommets de l'angoisse. Je vois des personnes se balancer d'avant en arrière, arracher la moitié de leurs poils de barbe, alors que d'autres en sont tellement submergés qu'ils se mordent la main jusqu'au sang. L'angoisse me questionne, elle est insidieuse et dévore tout sur son passage. Comment l'apaiser ? Cette angoisse qui nous habite tous délivre pourtant des messages importants. Elle nous assure peut-être que nous sommes là. En s'infiltrant dans le corps, comme si ce dernier voulait se rassurer : oui, je suis bien là sur cette terre, j'existe, j'existe, j'existe.

 

                                        dos courbe (mine graphite) 40x30cm

 

 

11 avril 2015

Introspectivement vôtre.

En un dimanche de soleil, je suis allée marcher en bonne compagnie dans la petite montagne du Taenchel. Un bel endroit, où des tapis de mousse verte recouvrent le sol et les roches, où le soleil d'avril forme des puits de lumière dorée en se faufilant entre les arbres, et où tout cela baignait au milieu du chant des oiseaux. En se promenant sur les sentiers, on rencontre de curieuses gravures dans les roches, ainsi que des amas de pierres gigantesques érodées comme si des êtres les avaient sculptées de leurs mains. On y trouve des vestiges d'un mur de rocailles, et on dit que ce mur venu d'un passé lointain, matérialise un fort courant énergétique. C'est une montagne que l'on dit être un haut lieu d'énergies positives. Tout visiteur peut y puiser des énergies revitalisantes et régénérantes, et il est vrai que c'est un endroit où l'on a envie de rester pour s'y ressourcer. On est perdu dans la montagne et pour autant, on ne s'y sent pas seul. On sent la présence des arbres, des buissons et des fleurs. C'est une présence chaleureuse et réconfortante.

J'ai croisé un jeune arbre. Il avait été coupé. Mais en grandissant, lentement avec le temps, le bois avait repoussé. Passant au-delà de sa blessure, l'arbre avait reformé son tronc, et sa cicatrice dessinait des courbes d'une fluidité et d'une beauté unique.

En le regardant, je comprenais. C'était comme si cet arbre susurrait à l'oreille du voyageur : avec le temps, toute blessure se reconstruit. Elle laisse à jamais une trace, à la fois profondément ancrée, et à la fois tellement visible. Cette cicatrice ne fait plus mal, mais elle fait partie de nous. Avec patience et puissance, tout se refait. On réussit à passer au delà de nos coups, au delà des claques que la vie peut infliger.

Je continuais à regarder la déformation que le bois avait pris en surmontant sa blessure. C'était peut-être la deuxième leçon à retenir : parfois, même si les blessures sont terribles, les cicatrices sont belles. En se régénérant, on devient plus beau, plus riche en nous-même. Comment parfois, le négatif se transforme en positif, si on lui accorde le temps nécessaire. Si un obstacle vient couper ta route, reconstruit un autre petit chemin pour le contourner et le dépasser.

 

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Il y a quelques semaines de cela, on m'a posé une question poignante, mais tellement franche.

Qui es-tu ?

Silence. Silence pesant quelques secondes, d'une lourdeur telle dans l'atmosphère ue l'on pouvait en sentir le poids sur nos épaules. Une question, trois pauvres petits mots et c'est tout. 

Qui déjà répondu à cette question ? Par où commencer ? Par quoi tu te définis ? On pourrait compter les réponses possibles par paquet de cent.

Je suis un humain, une femme, un homme, un père, une mère, je suis Cécile, je suis Françoise, Pablo, Phoebe, Vladimir, je suis jeune, vieux, blond, rousse, italien, turque, irlandais, suédois, américain, je suis une personne parmi des milliards d'autres, mais je suis unique, je suis un individu à part entière, je suis moi et pas toi, je suis un bon vendeur, un homme juste, une femme vaillante, je suis cadre, je suis dans le commerce, je suis un artiste, je suis conseiller, paysagiste, cascadeur. Je suis moi-même. Je ne sais pas qui je suis et je ne le saurais jamais. Je suis un amas de cellules qui pense et qui grandit. Je suis un tas d'atomes qui évolue. 
Je suis un être vivant, comme cet arbre qui grandit par delà ses blessures, je continue à m'élever en puisant ma sève dans ce qui fait de moi un être vivant.

Devant la difficulté à répondre clairement à cette question, je me dis que réfléchir à des réponses, c'est peut-être déjà une réponse en soi. Alors je réitère la question qui m'avait été posée, et m'avait transpercée d'un simple coup comme lorsqu'on tire sur une cible...

Toi, qui es-tu ?

6 mars 2015

Le plaisir de la plume.

Il y a peu de temps, j'ai réalisé une chose. J'écris depuis des années.

Au primaire déjà, j'adorais les dictées, ce qui bien évidemment, restait un secret. Qui aimait les dictées, ces exercices sévères et piégeant en orthographe la majorité des enfants ? A cet âge, je tenais un carnet secret. Il était vert, incrusté de filaments argentés, et je le fermais avec un fil rouge. Au collège, tout naturellement, j'ai eu besoin de plus de place. J'ai remplacé le petit carnet par de gros cahiers que je décorais à la main. Au collège, je suis passée aux journaux intimes. Et en cette époque ont émergé les blogs. C'était dans l'ère du temps, je l'ai suivie, j'ai alors découvert une autre manière d'écrire. En grandissant, j'ai appris à juger par moi-même l'utilité des blogs, appris à doser ce que j'allais y exprimer, pourquoi je l'exprimais, et comment le faire.

Parallèlement, je continuais à remplir des pages blanches sur Word que je n'exposais aux yeux de personne. Je stockais tous mes textes dans un dossier personnel de l'ordinateur portable. Ces textes étaient comme des pensées figées dans le temps. Je les relisais régulièrement, et me replongeais alors dans mes états d'esprit passés, réalisant que j'évoluais. C'est un sentiment agréable de se rendre compte que l'on grandit, et que l'on gagne en maturité. Et puis au delà de ça, je pouvais alors me remémorer des évènements passés que je pensais effacés à jamais de mon cerveau.

Ecrire, c'est se souvenir.

Ce dossier informatique regorgeait de pages et de pages, comportait, en quelques sortes, des années de ma vie. Jusqu'à janvier 2014. Il y a un an. Où par inadvertance, j'ai fais tomber l'ordinateur, cassant le disque dur qui devint subitement irrécupérable. Il a donc fallu un quart de seconde. Un quart de seconde pour perdre des années de pensées, de mots, de phrases et de souvenirs subtils. De tous les documents perdus, ce sont mes textes qui m'ont le plus manqué. Mais j'ai finis par me faire une raison et me dire qu'il fallait peut-être que je laisse un peu le passé de côté. 

plumeTranscrire mes pensées sous forme de boucles et de mots, former mes démons et mes joies par de longues phrases aux sonorités douces et aigres. J'écris. J'écris mon spleen, j'écris ma mélancolie autant que mon euphorie, j'écris mes larmes, ma douceur et ma violence.  J'écris et le temps s'arrête. J'aime écrire.

Remplir le papier. Modeler les pensées sous forme de mots. Leur donner des couleurs. Certaines personnes véhiculent leurs émotions en transformant un tas d'argile en une sculpture. Pour ma part, je forme des textes.

Ecrire a toujours été malgré moi. Cela a toujours été naturel, presque inné :
j
amais travaillé, jamais voulu, jamais forcé. J'aime le son de l'écriture : le pianotement des doigts sur le clavier. Le rythme de frappe est égal au rythme de défilement des pensées dans ma tête. 

Ecrire est un plaisir grammatical. 

Depuis quelques mois, j'ai acheté un beau stylo plume. Couleur rouge bordeau. Et pour varier, je me plais à écrire sur carnet. La plume. J'en écoute ses caresses sur le papier blanc. 

Ecrire, ce peut être aussi ça : un plaisir graphique. 

 



16 janvier 2015

Les maux.

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"  Il observe soigneusement la pierre polie par le temps et les belles formes que la nature a patiement créées.
Puis il découvre, inscrits sur une plaque, les vers de Rabindranath Tagore :

Ce n'est pas le marteau qui a rendu ces pierres si parfaites, mais l'eau, avec sa douceur, sa danse et sa chanson.

Là où la dureté ne fait que détruire, la douceur parvient à sculpter."

J'avais 17 ans lorsque j'ai lu cette phrase, extraite d'un livre de Paulo Coelho. J'avais 17 ans et beaucoup de mélancolie en moi. Certainement en ai-je toujours...Mais je lisais beaucoup car les livres étaient pour moi des pansements contre les peines, ils étaient des couleurs, des images, des larmes et des rires, des odeurs de fleurs, des battements de coeur. Les livres m'emportaient loin de la réalité tout en me l'apprenant à la fois, en eux je reconnaissais ma vie, sans être obligée d'y prendre part. Les livres me donnaient des instants de répit. De simples moments où la réalité me fichait la paix. 

Je pourrais écrire exactement les mêmes phrases, mais conjuguées au présent. Aujourd'hui je suis retombée sur cette citation, et elle me parle encore tellement, s'applique à la lettre tout simplement. Ces mots sont justes, ces mots me parlent. C'est un genre de vérité, une prise de conscience, que je n'ai entendue de la bouche de personne et que je n'ai lu sur aucun mur facebook, twitter ou je ne sais quoi. Les livres regorgent de petits trésors, petites pépites d'or d'un monde de papier que l'on retient ou que l'on ne retient pas. Un livre jette une pierre dans notre esprit...A nous de voir si elle fait des ricochets, des éclats, de longues ondulations, de grandes vagues...ou si elle coule directement dans les profondeurs. 
            

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